Dans un entretien à la chaîne de télévision France 2 diffusé lundi, le président syrien Bachar al-Assad accuse le gouvernement français de soutenir l'opposition à son régime, des «terroristes» contre lesquels il assure n'utiliser «que des armes conventionnelles».
20 Avril 2015, 20h52 | MAJ : 20 Avril 2015, 22h29
Calme et impassible. C'est sans sourciller qu'à plusieurs reprises, Bachar al-Assad a assuré au journaliste David Pujadas parti l'interroger en Syrie dimanche que la France soutenait les «terroristes» dans son pays. Dans un entretien télévisé accordé «dans l'une des résidences du régime» et diffusé ce lundi sur France 2, le président syrien s'est défendu d'avoir favorisé l'émergence de Daech (le groupe Etat islamique), d'avoir utilisé des armes chimiques ou «aveugles» sur sa population ou encore d'avoir fait tuer en 2012 le journaliste de la chaîne publique, Gilles Jacquier.
En revanche, Bachar al-Assad a déploré l'attitude à son égard du président François Hollande et accusé les Occidentaux d'avoir appuyé la révolte syrienne.
Pas de violence ni d'arme aveugle
«Est-il possible d'avoir le soutien de son peuple alors qu'on est brutal avec lui ?» a fait mine d'interroger l'interviewé, questionné sur les violences faites par son armée à ses opposants depuis l'insurrection débutée en mars 2011. Et Bachar al-Assad de poursuivre : «Il y a 23 millions de Syriens, comment peuvent-ils avoir peur d'une seule personne? Ça n'est pas réaliste!» Le président syrien l'assure, «ceux que vous appelez l'opposition, il s'agit de terroristes!»
VIDEO. Al-Assad accuse la France de soutenir les «terroristes»
Bachar al-Assad a beau admettre qu'il n'y avait au départ «pas que des jihadistes» dans les manifestations qui ont tourné au carnage, pas question de reconnaitre que le seul tort de certains était de demander plus de libertés. Le président syrien renvoie simplement le journaliste à «celui qui a pris une arme pour tuer le premier policier». Un «terroriste», tranche-t-il. «La liberté signifie-t-elle qu'on détruise une école?» insiste-t-il encore.
«Des terroristes se sont infiltrés en Syrie, avec l'appui d'Occidentaux, ont commencé à attaquer des civils et détruire des propriétés privées. Notre rôle est de défendre notre société», se défend le chef de guerre. Pour autant, Bachar al-Assad assure qu'il n'a utilisé que «des armes conventionnelles» pour repousser cette insurrection. Des barils explosifs, des armes aveugles ou chimiques? «Nous n'avons jamais entendu parler d'arme aveugle au sein de notre armée», assure-t-il. «Et c'est quoi les barils explosifs ?» poursuit le chef de Damas qui affirme n'avoir que «des armes qui visent les terroristes» puisque «à quoi bon tuer aveuglément? La guerre consiste à gagner le cœur des gens!»
La France soutient les «terroristes»
Quant au chlore, que l'organisation des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW) pense avoir détecté, «nous ne l'avons pas utilisé, nous n'en avons pas besoin. Nous avons invité l'ONU a faire une enquête», se targue-t-il même. Mais selon lui, l'Occident lui en veut : «Comment peut-on établir un dialogue avec un régime qui soutient le terrorisme dans notre pays? (...) La France est devenue en quelque sorte un satellite de la politique américaine dans la région. Elle n'est pas indépendante, et n'a aucun poids, elle n'a plus aucune crédibilité.» A-t-il, comme certains observateurs le pensent, sollicité la France pour rétablir des relations? «Nous, nous n'avons rien à demander aux renseignements français, nous savons déjà tout sur les terroristes», répond le président syrien.
Dans un extrait de l'interview révélé plus tôt par France 2, al-Assad reconnaît qu'«il y a des contacts mais il n'y a pas de coopération» entre la France et la Syrie. «Nous avons rencontré certains responsables de vos services de renseignement», précise-t-il. Fin février, des députés français s'étaient rendus en Syrie et certains d'entre eux avaient rencontré Bachar al-Assad. Ce voyage a été condamné par François Hollande qui a regretté «une rencontre entre des parlementaires français qui ne sont mandatés que par eux-mêmes et un dictateur qui est à l'origine d'une des plus graves guerres civiles de ces dernières années, qui a fait 200 000 morts».
Le Parisien - 20 04 15