Le FN n’a jamais atteint des sommets dans la capitale alsacienne, qui lui est sociologiquement peu favorable : ses meilleurs résultats aux élections municipales datent de 1989 (14,5% au premier tour, 12% au second). Il a par la suite souffert de la concurrence d’Alsace d’abord, et n’est plus présent au conseil municipal de Strasbourg depuis 2001. Le FN peut toutefois raisonnablement espérer y faire son retour en 2014. En effet, la dynamique montante de Marine Le Pen, l’absence probable de liste représentant une concurrence directe, et les dissensions internes de l’UMP pour désigner la tête de liste, devraient permettre de franchir la barre des 10% nécessaire pour accéder au second tour, voire mieux encore.
Julia Abraham, vous venez de fêter votre 21e anniversaire, et pourtant vous faîtes déjà figure de « vieille routière » de la politique. Pouvez-vous nous présenter votre parcours personnel ainsi que les motivations ayant conduit à votre engagement en politique au sein du Front national ?
D’un point de vue personnel, j’ai été après mon bac scientifique élève en Hypokhâgne, puis obtenu une licence d’allemand à l’Université de Strasbourg, et prépare actuellement les concours de l’enseignement. J’attache une très grande importance à mes études et à ma vie professionnelle, car je souhaite pouvoir en toutes circonstances conserver ma liberté de femme et ne pas me retrouver en situation de dépendance car je ne considère pas la politique comme une finalité professionnelle.
Dès l’adolescence, j’ai ressenti le besoin de m’engager pour défendre mes compatriotes que j’estimais victimes des gouvernements de droite et de gauche qui se sont succédé à la tête du pays. Très jeune, j’ai vu en Jean-Marie Le Pen le seul homme politique à tenir un discours de vérité, avec à cœur de défendre en priorité ses concitoyens… Lorsqu’à 15 ans j’ai commencé à vouloir militer pour ne pas rester spectatrice de la situation, je me suis naturellement tournée vers le Front national et ai commencé à imprimer les tracts de la présidentielle de 2007 pour les distribuer dans la cour du collège !
Puis, à 18 ans, j’ai adhéré, et dans la foulée, me suis présentée aux cantonales de Guebwiller où je fus la plus jeune candidate de France à accéder au second tour de ce scrutin. L’an dernier, à 20 ans, j’ai réalisé un score de près de 20% des suffrages en tant que candidate à la députation dans la deuxième circonscription du Haut-Rhin, et 14% à la cantonale partielle de Munster qui suivit.
Le FN s’est affirmé tantôt de « droite nationale » (récemment encore, Marion Maréchal-Le Pen se définissait comme étant une femme de droite), tantôt « ni gauche ni droite ». Sans nécessairement mettre en opposition ces deux affirmations, comment vous situeriez-vous ?
Je ne me sens ni de la droite actuelle ni de la gauche actuelle, dirons-nous… Il y a effectivement dans le terme « droite » la notion de défense des valeurs, du patrimoine, un certain conservatisme dans lequel je me reconnais, tout comme Marion Le Pen… mais qui n’a rien à voir avec la droite actuelle, à l’image de l’UMP, qui a non seulement mené la France dans le mur lorsqu’elle fut au pouvoir, mais qui, de surcroît, s’est essuyé les pieds sur tout ce qui pouvait être caractéristique de la droite dans l’esprit des gens. Rappelons qu’il y a eu plus d’immigrés clandestins régularisés sous Sarkozy que sous Jospin par exemple…
Cette droite ne vaut pas mieux que la gauche à mon sens, car toutes deux sont soumises à l’Union Européenne et à la logique ultra-libérale. En dehors de réformes sociétales introduites par la gauche (sur lesquelles la droite RPR/UMP n’est jamais revenue), leur bilan socio-économique est des plus semblables.
« Le gouvernement qui maltraite son peuple de manière implicite par sa façon de gérer – ou non – le pays a montré ce jour-là qu’il était aussi capable de passer à l’étape suivante et n’hésiterait pas à enclencher la violence physique. »
Législatives 2012 : le concurrent écologiste de Julia Abraham pris en flagrant délit de sourire !
Depuis la campagne présidentielle de 2012, vous faîtes partie de la direction nationale du Front national de la Jeunesse. Par le passé, le FNJ a tantôt été dynamique, tantôt moribond, et semble avoir récemment trouvé un nouveau souffle. Pouvez-vous nous dire comment le FNJ envisage sa stratégie de développement à l’avenir et quels sont ses projets pour les prochains mois ?
Le FNJ est en effet des plus dynamiques ! Il faut dire que le Front national est le premier parti des « jeunes » de France : 25% des 18-30 ans ont voté Marine Le Pen aux dernières présidentielles. Pour nous, il est impératif de faire du FNJ une véritable force politique qui agisse autant sur les lieux de travail, au sein des entreprises que dans les universités, partout où la bien-pensance et les syndicats ont longtemps fait régner leur diktat. La jeunesse a cela d’intéressant qu’elle n’a pas de tabous et qu’elle se fiche de recevoir des leçons de la part de vieux théoriciens qui ont tous lamentablement échoué : notre force, au Front national, est que les faits nous donnent raison!
Le FNJ s’implante donc, depuis quelques temps, de plus en plus dans les universités et nous continuerons sur cette voie pour l’année à venir, mais notre but est aussi d’avoir un maximum d’élus de moins de trente ans lors des prochaines échéances électorales, en particulier pour les élections municipales à venir. Aux dernières législatives, un candidat sur trois était issu du FNJ, et cela s’est avéré un véritable succès : voyez comme Marion Maréchal-Le Pen remplit ses fonctions de député avec brio ! Aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre des années.
La France a connu un sursaut inattendu à l’occasion des manifestations contre le mariage et l’adoption d’enfants pour les couples homosexuels. Vous avez participé à la plupart de ces rassemblements, pourriez-vous nous donner votre ressenti sur ces manifestations ?
J’ai participé entre autres à la Manif pour tous du 24 mars dernier, et je dois avouer avoir été sidérée par les directives de Manuel Valls à l’égard des manifestants. Le fait que la France bien élevée descende dans la rue et crie sa colère a sans doute surpris le gouvernement, mais il ne semble pas s’être remis en question une seule fois, ni même avoir tenu compte du cri de son peuple ! Et, puisqu’il faut bien y revenir, l’usage des gaz lacrymogène sur des mères de famille, des personnes âgées et des enfants en bas âge, dont j’ai moi-même été victime, est digne des techniques de répression soviétique. Le gouvernement qui maltraite son peuple de manière implicite par sa façon de gérer – ou non – le pays a montré ce jour-là qu’il était aussi capable de passer à l’étape suivante et n’hésiterait pas à enclencher la violence physique. Puisse le peuple français s’en souvenir aux prochaines élections…
Les « Manif pour Tous » ont mobilisé peu de monde en provenance du nord et de l’est de la France, qui sont des régions fortes pour le Front national. En revanche, l’ouest de la France, qui est sociologiquement une région plus faible pour le Front national, plus orientée à gauche ou vers un vote souverainiste (de type MPF), s’est fortement mobilisé. Le Front national a eu une position jugée ambivalente par certains lors de ces manifestations, puisque sa présidente Marine Le Pen n’a pas participé aux manifestations, tout en étant l’un des rares responsables politiques à affirmer qu’en cas d’accession au pouvoir elle procèderait à l’abrogation pure et simple de la loi (sans effet rétroactif).
L’un des enjeux pour le FN pourrait être d’amener à lui ces masses de manifestants, qui pourraient être tentés par le vote UMP ou par les tentatives d’engagement électoral entreprises par certains leaders des Manif pour Tous. Qu’auriez-vous envie de dire à cette France qui a, comme vous, battu le pavé ces derniers mois, mais qui ne votera peut-être pas pour les listes de votre formation politique aux prochaines échéances électorales ?
De se tourner vers la seule force politique qui tiendra sa parole non seulement sur le sujet, mais qui aura également le courage de changer les choses au niveau économique et social ! Marine Le Pen n’a pas souhaité manifester pour montrer que pour elle, le principal problème restait le chômage, l’insécurité, la dette, les gabegies de l’argent public… Et je pense qu’elle a raison. Il n’en demeure pas moins que sa position sur le mariage homosexuel a toujours été très claire.
Et je rappelle à tous ceux qui auraient encore envie de voter UMP malgré le bilan lamentable de Sarkozy que nous lui devons, entre autres, l’insertion des « théories du genre » dans les manuels et programmes scolaires !
Mars 2011 : première campagne cantonale pour Julia Abraham
Revenons en Alsace. Alors qu’elle a longtemps été une région de quasi plein-emploi, l’Alsace a désormais quasiment « rattrapé son retard » par rapport au reste de la France et connait un taux de chômage similaire à celui du pays. Comment expliquez-vous cette chute brutale ?
Ce n’est pas une chute brutale, en réalité : nos barons locaux ont toujours cru que l’Alsace était préservée ad vitam eternam de la situation nationale, ce qui est ridicule. Le déclin de la situation économique alsacienne ne date pas d’hier et s’est poursuivi, là encore, sous les gouvernements de droite comme de gauche.
Ce déclin s’est amplifié du fait de la désastreuse désindustrialisation qui fait ravage dans notre pays. L’Alsace est (était) une région fortement industrialisée. La situation économique de l’Alsace aujourd’hui était donc largement prévisible car elle dépend complètement de la situation économique à l’échelle nationale, où nous sommes écrasés par les concurrences déloyales de pays ayant des coûts de production incomparables aux nôtres (sans que nous y retrouvions pour autant des différences significatives lors de l’achat de ces produits en magasin !).
À Munster, Sainte-Marie-aux-Mines, Guebwiller, les usines ont fermé les unes après les autres, en faisant ainsi des vallées « mortes », au profit de l’une ou l’autre multinationale qui crée l’un ou l’autre emploi aujourd’hui pour le supprimer d’un claquement de doigts demain… Quant aux élus locaux, ils n’ont rien vu venir et n’ont rien entrepris pour le maintien de notre tissu productif.
« En tant que patriote, je suis opposée à l’UE qui bâillonne les peuples et pille les états, mais je suis favorable à une Europe des nations libres et des peuples souverains. »
Vous serez candidate avec Me Kornmann aux élections municipales de mars 2014. Quels seront les principaux axes de votre campagne ? Quels résultats espérez-vous obtenir à Strasbourg ?
Nombreux sont les points critiquables dans la gestion socialiste de notre belle ville ! Pour n’en citer que quelques uns, au quotidien, le prix des transports de la CTS est, par exemple, absolument exagéré. Il faut absolument s’atteler à un gel des prix à un niveau raisonnable, entre autres pour le tramway, qui pèse souvent lourd dans le budget des étudiants. Avec André Kornmann, nous tenons également à redynamiser le commerce de centre-ville, asphyxié par un accès très difficile et par une politique exagérément répressive à l’endroit des automobilistes (que Roland Ries entend encore aggraver).
Il faut également faire mention de l’insécurité, qui est toujours gravissime, en particulier dans certains quartiers tristement célèbres pour le nombre de véhicules brûlés le jour de l’an (mais aussi tout au long de l’année).
La barre des 15% (encore jamais atteinte par le FN à Strasbourg), au vu de l’espoir que représente Marine Le Pen notamment pour les classes moyennes et les jeunes, ne me semble pas inatteignable, et doit constituer notre objectif.
En tant que strasbourgeoise, il est difficile d’éluder avec vous la question européenne. Le FN est un adversaire résolu de l’appartenance de la France à l’Union européenne, tandis qu’en Europe émergent de plus en plus de mouvements puissants opposés à l’Union européenne, qu’ils soient souverainistes, populistes, nationalistes ou ultra-radicaux. Quel type d’alternative voyez-vous à l’Union européenne actuelle ? Par le biais du FNJ, disposez-vous déjà de mouvements de jeunesse partenaires en Europe ?
Que les choses soient claires : en tant que patriote, je suis opposée à l’UE qui bâillonne les peuples et pille les états, mais je suis favorable à une Europe des nations libres et des peuples souverains, qui me semble être la seule alternative. Il faut que chaque pays puisse évoluer selon ses besoins, tout en restant en étroite coopération avec ses partenaires européens (contrairement à ceux qui affirment de façon mensongère que nous voudrions nous mettre en situation d’autarcie).
Par le biais du FNJ, nous disposons d’ores et déjà de mouvements de jeunesse partenaires en Europe : les jeunes du FPÖ autrichien par exemple, les patriotes flamands, italiens… Nous avons conscience que l’avenir des peuples européens – et donc le nôtre – passera par un combat fraternel contre l’UE et les lobbys qui nous imposent leur carcan.
Un mot de conclusion pour les lecteurs de Nouvelles de France ?
Ne lâchons rien ! Notre combat est juste, nous nous battons en honneur aux générations précédentes mais également pour celles à venir. Petit à petit, les faits nous donnant raison et Le Pen ayant toujours dit la vérité (quel qu’en fut le prix), les gens sont de plus en plus nombreux à nous faire confiance et notre mouvement trouve un écho considérable même parmi des électorats qui ne nous étaient, a priori, pas acquis. Mobilisons-nous lors des prochaines municipales, pour redonner l’espoir au peuple français !
Nouvelles de France