C'est sans "tabou" que Nicolas Sarkozy a décidé de s'adresser à l'électorat FN. La "préférence nationale"? "Au nom de quoi on n'aurait pas le droit de dire ça ?". Marine Le Pen ? Elle est "compatible avec la République".
« Mais quel thème serait tabou? », rétorque Nicolas Sarkozy quand on l'interroge, ce mardi à Longjumeau (Essonne), sur les limites qu'il se fixe dans le dialogue qu'il a ouvert avec électeurs de l'extrême droite depuis dimanche soir. « La question de l'immigration est un sujet dont il faut parler », de même que la « nation », où les « frontières ».
Quid de la « préférence nationale » défendue par le Front national?, insiste un journaliste, alors que le candidat prend un café dans un bistrot baptisé « L'excuse », sa porte-parole Nathalie Kosciusko-Morizet à ses côtés. Et lui, sans hésiter: « moi je suis pour la préférence communautaire, mais je ne vois pas au nom de quoi on n'aurait pas le droit de dire ça ».
"La gauche bien pensante"
Le vote pour Marine Le Pen « n'est pas répréhensible » , poursuit-il, « sinon la République lui aurait interdit de se présenter (…) Si vous avez le droit de vous présenter (…) vous êtes compatible avec la République ». Envisage-t-il, dès, lors d'augmenter le niveau de proportionnelle aux législatives pour ouvrir la porte de l'Assemblée nationale au FN? « Je ferai des propositions », élude-t-il...
C'est donc sans complexes et sans « tabou » que Nicolas Sarkozy entend parler aux « Français qui souffrent », ceux qui ont voté FN au premier tour de la présidentielle et qu'il doit attirer sur son nom pour espérer l'emporter au second. « La gauche bien pensante, ça la gêne? Raison de plus! Si ça la gêne je vais le faire! », lance-t-il en meeting.
« C'est le candidat de gauche qui est minoritaire », théorise le ministre de la Défense Gérard Longuet, qui accompagne le candidat ce mardi. « C'est jouable. Tout est ouvert », car « les électeurs du FN sont plutôt à droite qu'à gauche » et « je crois qu'ils élimineront François Hollande parce que c'est le contraire de ce qu'ils souhaitent ».
Il fustige le "terrorisme" des médias
Certains tordent le nez ? « Il y a un véritable terrorisme! », peste Sarkozy au sujet des médias. « Quand M. Hollande et M. Mélenchon défilent ensemble, c'est parfait. Mais moi quand je veux parler aux électeurs qui se sont portés sur Marine Le Pen, c'est un problème? ». « Allez mendier les voix de l'extrême gauche, c'est noble? », dira-t-il ensuite à la tribune.
Lors de son meeting, Nicolas Sarkozy a donc défendu plus que jamais la « valeur travail », la famille et fustigé l'excision, la burqa, le droit de vote aux étrangers, et l'immigration: « ça ne peut plus durer. A force d'accepter trop de monde sur notre territoire, notre système d'intégration ne fonctionne plus », martèle-t-il. De même, « la France a des racines chrétiennes que cela plaise ou non », lance-t-il à un public ravi. Tout cela, « ce ne sont pas des idées de droite, encore moins des idées d'extrême droite. C'est une question de bon sens ».
Mélenchon, "mon dieu quel talent"
Le président-candidat fait aussi huer dans ses meetings les « observateur, sondeurs et spécialistes . A la tribune, il se moque des « spécialistes. Je me demande bien spécialistes de quoi ». Avant le premier tour, « il y en avait que pour M. Mélenchon (…) Plus il disait de bêtises plus on en parlait. Mon dieu quel talent! Quelle vision! ! C'était avant le premier tour.. ». Aujourd'hui, « il faudrait qu'on ne parle que » de Marine Le Pen.
Hors de la tribune, la lune de miel du début de la campagne avec les journalistes est aussi bien terminée. « Vous-mêmes vous expliquiez que je serai pas au second tour », lance-t-il à celui qui l'interroge. « Et ça continue! », peste-t-il. Gare , dès lors, au représentant de tel ou tel quotidien dont une Une lui aurait déplu, dûment chapitré. Les journaux, « le plus admirable, c'est qu'il y ait encore des gens pour les payer! ».
Un (petit) mot pour les centristes
Mails il ne faut pas voir dans ce durcissement un virage assure-t-il. « Je reste sur les fondamentaux de ma campagne », souligne Sarkozy, en renvoyant à son interview au Figaro Magazine au lancement de sa campagne. Au milieu de ce discours très droitier, Nicolas Sarkozy a eu quand même un (petit) mot pour les électeurs du centriste François Bayrou. « Ils nous disent: les déficits ça ne peut plus durer », déficits auxquels contribue selon lui... « une immigration motivée par l'attraction de prestations sociales parmi les plus généreuse d'Europe ». Donc, « on est au coeur des inquiétudes (…) des électeurs centristes », assure-t-il.