REPORTAGE - En déplacement dans le sud-est de la France lundi, la candidate du Front national craint que la crise des banlieues ne «dérape».
À Nice et Menton
«Moi, je veux avoir le bilan. C'est quoi, le bilan des cinq derniers jours d'émeutes dans les banlieues françaises? Combien ça coûte tout ça? Parce que ce sont les Français qui payent, des Français qui ont de plus en plus de mal à payer leurs impôts et qui, systématiquement, sont obligés de prendre en charge ce que les crapules détruisent et brûlent.» De passage lundi matin à Nice, où elle s'est recueillie sur la Promenade des Anglais en hommage aux 86 victimes de l'attentat du 14 Juillet, Marine Le Pen est revenue longuement sur la crise des banlieues dont elle craint maintenant qu'elle ne «dérape».
La candidate du Front national n'a pas eu de mots assez durs pour fustiger l'attitude du gouvernement. «Non seulement il ne fait pas son travail, mais il n'ose même pas prendre la parole alors que les faits qui se déroulent depuis quelques jours sont un très grave signal que nous sommes en train de danser sur un volcan», a-t-elle souligné dans les allées du cours Saleya, à Nice, sous une nuée de caméras et de micros, en recevant par ailleurs un accueil plutôt chaleureux des badauds du marché des brocanteurs.
Accusant Bruno Le Roux, le ministre de l'Intérieur, de ne «rien dire» et ne «rien faire», la favorite des sondages pour le premier tour a enfoncé le clou: «Nos forces de police continuent à être attaquées, ce sont des tentatives d'assassinat, et on appelle ça des incidents. Est-ce qu'on va enfin dire la vérité ? (…) Il y a quand même des types qui ont mis le feu à une voiture avec une femme et deux enfants à l'intérieur. Est-ce qu'on va laisser cette impunité pendant longtemps, ou est-ce qu'on va enfin reprendre la main et remettre de l'ordre en France? C'est ça, la vraie question.»
Plus largement, elle a conspué une classe politique «tétanisée», selon elle, et coupable «de se cacher et d'avoir le sentiment que la moindre parole pourrait entraîner une aggravation des émeutes». «Mais ça veut dire quoi, qu'on vit dans la peur des émeutiers, qu'on se soumet à eux, ça veut dire qu'on n'ose même plus respecter la loi, de peur qu'ils se servent de cela pour aggraver leur comportement?», s'est-elle encore interrogée.
Un «grand plan de désarmement des banlieues»
Entre deux selfies avec ses partisans, Marine Le Pen a ensuite déroulé ses propositions, préconisant un «grand plan de désarmement des banlieues». «Aujourd'hui, a-t-elle insisté, les armes se cachent dans les banlieues et on le voit bien, on voit des délinquants dire que c'est plus facile de trouver une arme dans les banlieues que du boulot. Ce que je crois assez vrai.» La candidate FN a indiqué vouloir «réarmer moralement et matériellement les policiers: moralement, par la mise en œuvre de la présomption de légitime défense, et matériellement, avec l'ensemble de ce qui peut leur permettre de remplir leur mission et qu'ils n'ont pas aujourd'hui». Avant d'évoquer la nécessité de construire 40.000 places de prison et de recruter 15.000 policiers supplémentaires.
Marine Le Pen a ensuite gagné Menton où, après un déjeuner sur le front de mer avec les cadres locaux du parti et malgré une grippe carabinée, elle a rendu visite aux fonctionnaires de la Police aux frontières (PAF) afin de défendre son idée de fermeture de la frontière française, mais «accompagnée d'une politique dissuasive d'immigration». Au passage, elle n'a pas manqué de regretter que Cédric Herrou, l'agriculteur de la vallée de la Roya jugé la semaine dernière à Nice pour avoir aidé des migrants, n'ait pas «été condamné assez lourdement». «C'est un passeur qui se drape dans des considérations humanitaires, alors qu'en réalité il agit par idéologie», a-t-elle jugé.
Cet article est publié dans l'édition du Figaro du 14/02/2017.