Polémia revient sur cette incroyable entreprise de démolition de tous nos arts qu’est l’art dit « contemporain ».
Tout change, tout doit changer, « tout est à réinventer… », c'est du moins ce que vient de rappeler le président de la République, lors de son discours à Annecy le 6 février 2012. Les arts, dans ce changement obsessionnel, n'ont pas été épargnés.
Ce qu’on appelle « l’art contemporain » n’a jamais été artistique : venu de New York et détrônant Paris de sa couronne de capitale des arts, il n’avait rien à voir avec le gagne-pain des rapins.
« Celui qui a l’or fera la loi », dit un proverbe bien connu des financiers. La capitale de la finance étant indiscutablement New York, si l’entreprise de l’art contemporain a pu prospérer jusqu’à envahir Versailles, la Côte d’Azur et quelques lieux de culte, c’est que ceux qui tiennent le haut du pavé à Wall Street le voulaient ainsi. Devant ces œuvres perverses dont la statue devant l’aéroport de Nice (*) n’est qu’un exemple, la majorité de nos concitoyens, peu versés sur ce genre de production, préfèrent dire leur méconnaissance du sujet, à moins que la stupéfaction ne leur ait coupé la parole. Cette population se souvient certainement de ce qu’on a pu dire sur l’impressionnisme, mal accueilli à ses débuts. Alors, elle est tentée par l’abstentionnisme. D’ailleurs, avec la crise et les difficultés actuelles, elle a autre chose en tête.
Les autoproclamés spécialistes de ces étranges productions vous diront aussi que l’art classique avait produit toute la substance qu’il pouvait donner et que les artistes se répétaient et tournaient en rond. Alors, si des spécialistes le disent…
Nous avons pu cependant apprécier la pertinence du jugement de ces gens en recevant une lettre du critique d’art du Figaro, Michel Nuridsany, qui avait bien voulu répondre à une demande d’explications où l’auteur de ces lignes s’étonnait un peu que la simple pose de rayures de 8,7 cm sur une œuvre puisse apporter à celle-ci un supplément d’intérêt. Et dans cette lettre à la dactylographie approximative, Nuridsany relevait notre erreur : les rayures ne faisaient pas 8,7 cm mais 7,8 cm et cela, bien sûr, faisait toute la différence. Buren s’était lancé à l’époque dans des lames de parquet de bois différent et une photo du Figaro montrait des tulipes en rangs d’oignons qui respectaient bien l’écartement souhaité : 7,8 cm.
Pour Yves Klein, cela relevait un peu du même procédé, sauf que lui repeignait en bleu tout ce qui lui tombait sous la main, une nuance de bleu qui lui avait tapé dans l’œil. Qu’un autre crée une œuvre et lui se chargerait du badigeon final. Son rêve aurait été de peindre la Vénus de Milo avec ce bleu incomparable. Hélas, ce ne fut pas possible et, très déprimé, le pauvre Klein finit par mettre fin à ses jours.
Nous avons cité ces deux éminents artistes parce que nos « critiques d’art » ne trouvaient pas (ne trouvent toujours pas aujourd’hui) de termes assez élogieux pour les qualifier. A propos de ces critiques d’art, peut-être serait-il bon de rappeler quelques petites choses :
Leur (auto)création est récente. Avant eux, il n’y avait rien et le milieu artistique, comme aujourd’hui celui de l’artisanat d’art (joailliers, couturiers, denteliers, etc.), s’en passait fort bien. Comme disait Degas : « Avez-vous besoin d’un critique pour savoir si la soupe est bonne ? » Et le même ajoutait, méprisant : « Critique d’art, critique d’art, est-ce que c’est un métier, ça ? Et dire qu’il y a des artistes assez bêtes pour se soucier de leurs avis. »
Picasso avait une opinion à peu près similaire : « Lorsque je peins un tableau, je ne me soucie pas de donner la moindre explication. Je sais bien qu’il y aura toujours quelqu’un pour le commenter et expliquer aux badauds ce que je voulais dire. » Et si Picasso n’avait dit que cela !
Aujourd’hui, on écrit beaucoup sur l’art. Et même quelques artistes s’en mêlent. En général, ce ne sont pas les meilleurs : ceux-là se contentent de créer ; mais d’autres, dont la veine créatrice est en général un peu tarie, aimeraient bien donner de savantes théories. Comme disent (à peu près) les Anglais : « Celui qui peut faire quelque chose, le fait. Celui qui ne peut pas, donne des conseils. » Tous ces bavardages inutiles énervaient passablement Braque qui professait que devant une œuvre il fallait se couper la langue et laisser le tableau parler pour le peintre.
Pour reprendre ce que nous disions plus haut, l’excuse, donnée par certains comme justification de l’ « art contemporain », à savoir que nos artistes n’avaient plus rien à dire et tournaient en rond, est un culotté mensonge ! Voyons d’un peu plus près :
Les œuvres de Leonor Fini ressemblaient-elles à celles de Rouault ? Celles de Dali à celles de Hilaire ou de Cassigneul ? Bellmer copiait-il Utrillo, Max Ernst et Balthus ? Verlinde se souciait-il de Derain et Carzou d’Yves Brayer ? En quoi Matisse faisait-il de l’ombre à Buffet ou Magritte à Michel Ciry ? Des noms comme ceux-là, on pourrait en aligner des dizaines et encore en oublier beaucoup, car c’est volontairement que nous avons laissé dans l’ombre des noms comme Picasso, Braque ou Matisse. Et que Magritte veuille bien nous pardonner. Non, Paris n’avait jamais déchu ! Et dire que les artistes qui y travaillaient n’avaient plus rien à dire et répétaient les mêmes productions relève du plus pur mensonge.
Nous proposons de remplacer les trois mots de notre devise républicaine, qui n’ont jamais eu la moindre répercussion dans la vie des Français, par une autre, moins ambitieuse certes, mais combien plus proche de la réalité : « Ne croyons rien de ce qu’on nous dit et pas la moitié de ce qu’on nous montre. »
Léon Arnoux
20/02/2012
Note : (*) Voir : Icônes de la barbarie ou de la nouvelle religion ?
Correspondance Polémia – 24/02/2012
Image :Anthropométrie de l'Époque bleue (2'26) Yves Klein
9 mars 1960
Galerie internationale d'art contemporain
253, rue Saint Honoré, Paris, France