Jusqu’au bout, Alain a cru qu’il n’avait que blessé son agresseur. Jeudi, en fin d’après-midi, ce bijoutier de l’avenue de la Motte-Picquet, à Paris, a dû se rendre à l’évidence : les pompiers n’avaient rien pu faire pour sauver sa victime, un homme de 52 ans qui venait de tenter de braquer son commerce. « Lorsqu’il a appris la nouvelle, il a été bouleversé, souffle Me Laurent-Franck Lienard, l’avocat du bijoutier.
D’après les résultats de l’autopsie, réalisée hier, deux balles ont été tirées dans l’épaule droite de la victime. L’une d’elles a ricoché avant de traverser le thorax et de provoquer une hémorragie. Le braqueur est décédé en vingt minutes. Jusqu’alors inconnu des services de police, il avait seulement été mentionné une fois au Stic, le système de traitement des infractions constatées, pour une affaire de recel. « Il n’a pas eu de chance, estime une source policière. Ses blessures auraient pu ne pas être mortelles. »
Placé en garde à vue, Alain a détaillé sa version des faits, qui semble coller avec les éléments de l’enquête et accréditer la thèse de la légitime défense. Le braqueur aurait fait irruption armé dans la boutique, mais on ne connaît pas pour l’instant la nature de l’arme ni si elle était réelle ou factice. D’abord, le bijoutier aurait tenté de désarmer son agresseur. « L’enquête n’en est qu’à ses débuts, mais il y a eu lutte à mains nues, reprend Me Lienard. Les traces de coups qui ont marqué mon client sur le visage et les bras l’attestent. Alors qu’il était mis en joue, il a ensuite répliqué et fait feu. »
Le commerçant possédait son arme légalement. Il disposait d’une autorisation de la préfecture, à titre de défense, délivrée pour cinq ans et qui venait d’être renouvelée. Veuf, installé dans le quartier de longue date, le bijoutier avait déjà été agressé et braqué par le passé. « Il avait été traumatisé, relève son avocat. Mais ça n’en faisait pas pour autant un va-t-en-guerre. Tout le monde le décrit comme quelqu’un de très calme et discret. »
Les commerçants du secteur ont d’ailleurs organisé une collecte en sa faveur. Un à un, ils ont été interrogés par les enquêteurs du troisième district de police judiciaire. Alors que la piste d’un éventuel complice était avancée jeudi, « nous sommes très prudents sur cet aspect, souligne une source proche de l’enquête. Quelques témoins mentionnent la présence d’un second individu, mais nous n’avons pas grand-chose si ce n’est la photo d’un homme de dos qui nous a été remise. »
Le bijoutier saura, lui, aujourd’hui en fin d’après-midi, le sort que lui réserve la justice à l’issue de sa garde à vue. Son conseil en est persuadé : « Il a tiré dans un cadre légal, avance Me Lienard, donnant une réponse proportionnée à la menace de cet individu qui le braquait avec l’intention de tirer. »
Le Parisien - 21/07/12
Les commerçants du quartier soutiennent le bijoutier
NdB: Curieux: le bijoutier a un prénom, Alain, mais le braqueur n'en a pas...