lepoint.fr : Vous êtes un admirateur de Frédéric Mitterrand. Comment s'est passée votre collaboration avec lui ?
Philippe Barassat : Oui, j'aime beaucoup sa voix. Je lui ai donc écrit afin qu'il joue dans mon film. Je lui ai envoyé mon scénario. Et il a accepté de jouer bénévolement, comme la plupart des acteurs du reste. À l'origine, il devait jouer un professeur dans une classe. Faute de moyens, nous n'avons pas pu tourner cette scène. À la place, il a lu un texte de Camus dans une pièce un peu abstraite avec une affiche du film La Vie est belle au-dessus de lui. J'ai situé ce plan en prologue du film.
Ses services assurent qu'il n'a pas vu le film. Est-ce plausible ?
Je lui ai envoyé plusieurs DVD à la sortie du film. On s'est revus plusieurs années plus tard alors qu'il était président de la commission d'avances sur recettes au CNC. À l'époque, j'étais lecteur au CNC. On en a discuté. Il m'a semblé qu'il l'avait vu. Et je constate d'ailleurs que le film figure dans son CV officiel. En outre, le film a reçu un accueil critique très favorable dans Libération, Le Monde , Les Inrocks ... Il a circulé dans tous les festivals du monde. Il a reçu le Prix de la qualité du CNC et a même été primé à New York.
Votre film aborde le thème délicat de l'homosexualité infantile... Comprenez-vous la polémique qu'il suscite sur le Web ?
Pas vraiment. En tout cas, pour moi, le thème n'est pas l'homosexualité infantile. Je ne préjuge pas de la sexualité des enfants que je filme. D'ailleurs, Éric, mon personnage, ne devient pas homosexuel à la fin du film. Le CNC a d'ailleurs refusé de me financer. Ils voulaient qu'Éric devienne homosexuel à l'âge adulte et que le film ne comporte aucun plan de bite (sic). Or, puisqu'on parle de l'énorme bite de Rachid, il me semblait essentiel de la montrer. C'était une façon de se débarrasser du sujet au début du film pour mieux se concentrer sur l'histoire. Précision : la bite qui est filmée est une bite d'adulte. C'est Gaspard Noé qui nous a trouvé l'acteur adulte pour ce plan.
Il y a quand même un plan métaphorique très choquant où l'on voit deux enfants chevauchant à travers le ciel un énorme phallus construit sur le modèle d'une fusée...
Dans mon idée, c'est une évocation enfantine de Nicolas et Pimperenelle qui, dans la séquence Bonne nuit les petits , finissaient par voguer sur un nuage. Ce film n'est pas pédophile. Ce n'est pas parce qu'on aborde la sexualité des enfants qu'on fait un film pédophile. C'est une vision déformée par le scandale Mitterrand. Pour utiliser une comparaison, ce n'est pas parce qu'on filme la sexualité des animaux qu'on fait un film zoophile...