De N'Djamena, où une "commission d'enquête" sur la disparition d'opposants va être créée, au Cap où il a annoncé une remise à plat de la présence militaire française en Afrique, Nicolas Sarközy s'est présenté comme le président de la "rupture" avec la "Françafrique".
Le président français s'est rendu mercredi au Tchad, jeudi et vendredi en Afrique du Sud pour une visite d'Etat, accompagné de son épouse Carla Bruni-Sarközy, dont c'était la première sortie officielle.
Près d'un mois après une attaque sanglante de rebelles (400 morts), les 2 et 3 février, qui aurait pu coûter cher au président Idriss Deby Itno si la France ne lui avait apporté une aide décisive, M. Sarközy a tenté de persuader son homologue tchadien de remettre en marche le processus démocratique.
Mercredi soir à N'Djamena, il s'est félicité d'avoir convaincu M. Deby de créer une "commission d'enquête internationale" sur la disparition de deux opposants. "Je ne regrette pas ma venue, elle a été utile", a-t-il affirmé.
Pourtant, M. Sarközy n'a pas réussi à obtenir des éclaircissements sur le sort des deux hommes, disparus depuis le 3 février. Ce qui a fait dire à Delphine Djiraibé, une porte-parole de la société civile tchadienne, que "la commission d'enquête ne servira à rien".
A Paris, le Parti socialiste a dénoncé "la frilosité" de la France au Tchad.
M. Sarközy a également plaidé auprès de M. Deby pour que la force européenne (l'Eufor), chargée de protéger les réfugiés du Darfour, puisse se déployer "le plus rapidement possible" dans l'est du Tchad.
Il a par ailleurs évoqué avec son homologue le cas des condamnés de l'Arche de Zoé, qui purgent leur peine en France, et que seul M. Deby peut gracier, mais il a insisté sur le fait que ce n'était "pas l'un des objectifs" de sa visite.
En Afrique du Sud, le président Sarközy a également voulu montrer que "la transparence faisait partie de la nouvelle politique française en Afrique", comme il l'a dit à la presse à N'Djamena, et que c'en était finie de la "Françafrique", système régulièrement dénoncé par les opposants à la politique française sur le continent.
Au Cap, il a annoncé devant les parlementaires la "renégociation" des accords militaires de la France en Afrique (huit pays sont concernés, selon l'Elysée).
Chaque nouvel accord avec un pays africain sera désormais publié "dans la transparence", a déclaré M. Sarkozy.
Le président sud-africain Thabo M. Mbeki, qui prône une "renaissance africaine" et une meilleure intégration du continent sur la scène mondiale, a salué cette annonce: "Cela fait partie de la suite du processus de décolonisation en Afrique."
M. Sarközy a par ailleurs promis "une initiative de soutien à la croissance économique" de l'Afrique, portant sur 2,5 milliards d'euros en 5 ans. Plusieurs accords économiques (transport, tourisme, développement durable notamment) ont également été signés, ainsi qu'un contrat de 1,36 milliard d'euros pour la construction d'une centrale au charbon par le groupe industriel français Alstom.
C'est également au Cap, lors d'une conférence de presse commune avec son homologue sud-africain, que le président a lancé un nouvel appel aux Forces armées révolutionnaires colombiennes (Farc) pour qu'elles libèrent Ingrid Betancourt, au plus mal selon des otages récemment libérés, se déclarant "prêt" à aller lui-même la chercher à la frontière entre la Colombie et le Venezuela.
Le président, qui peut oublier le temps de son voyage en Afrique ses déboires dans son pays, où chaque sondage démontre la chute de sa popularité, a rencontré au Cap, en compagnie de son épouse, l'archevêque Desmond Tutu.
Vendredi, le couple présidentiel s'apprêtait à rendre visite à Johannesburg à un autre Nobel de la Paix et héros de la lutte anti-apartheid, Nelson Mandela, l'emblématique premier président noir d'Afrique du Sud.
AFP.28.02.08