Devant le Carlton, des enfants habillés comme des princes descendent de voitures luxueuses, précédées par des montagnes de valises. Dans les salons du palace, de prestigieux buffets attendent les convives apprêtés. Des buffets entièrement casher. Sans beurre, ni crème, comme l'exige le rite ancestral. Mais à l'exquis raffinement. Sur les nappes immaculées, du pain azyme et du Coca, casher aussi ! Venues des quatre coins de la France mais aussi d'Italie, d'Angleterre, de Suisse, de Belgique et des Etats-Unis, des dizaines de familles juives fêtent Pessah sur la Croisette. Parmi elles, la famille Dagul de Londres. Autour de la table, quatre générations. Ils sont tous là, de la petite Anabelle 18 mois, à Sidney, 88 ans, l'arrière-grand-père. Onze personnes réunies pour vivre ensemble ce temps fort du judaïsme qu'incarnent la Pâque juive. « C'est la quatrième année que l'on vient. On aime l'ambiance, la cuisine. On a même un cousin d'Israël qui nous rejoint » explique Danielle Lipton, ravie.
Car ce séjour cannois mêlant activités cultuelles et culturelles, animations et recueillement, bénéficie d'un succès exponentiel. Il y a cinq ans, ces touristes traditionalistes occupaient 50 chambres du Carlton. Cette année, 140 ont été réservées dans le palace et une centaine à l'hôtel Montfleury. « Cette année, la communauté dépasse les 500 personnes dont 80 % d'anciens clients. Notre meilleure publicité, c'est le bouche à oreille » explique David Guez, l'organisateur de ce type de séjour depuis de nombreuses années. L'occasion pour ces familles parfois dispersées géographiquement de se retrouver, pour partager, prier, mais aussi se divertir au soleil de la Côte.
Deux synagogues dans des salles de réunion
Des familles qui déboursent entre 3 à 5000 € par personne. Une bonne partie du Palace a été louée pour satisfaire aux traditions religieuses. Ainsi, deux salles de réunion ont été aménagées en synagogue afin d'accueillir les offices pour l'allumage des bougies ou les seder. Et la cuisine a été spécialement scindée pour que la dizaine de toques de David Guez Organisation puisse assurer la « cacherout » pour 8000 repas en dix jours ! Au menu, des plats traditionnels de Pessah tels que la carpe farcie ou le potage matzabal, mais aussi de la cuisine gastronomique. Temps fort, demain dimanche avec une soirée de gala et des conférences sur l'éthique, en présence d'Olivier Stirn conseiller à la présidence pour l'Union pour la Méditerranée et Gilles Bernheim, grand rabbin de France. « Le beau temps est dans les coeurs. Il va devenir effectif...» a-t-il glissé à son arrivée mercredi. C'est son premier séjour cannois pour Pessah. Mais peut-être pas le dernier.
Le clan Kanter est venu de Metz.
Comme chaque année depuis dix ans. « Cela nous permet de nous rassembler. Les appartements sont trop petits et cela fait beaucoup de travail », glisse Bernard Kanter, visiblement heureux de rassembler sa tribu qui occupe cinq chambres au Carlton. Un palace ou ils séjournent chaque Pessah depuis quatre ans. Cette année, ils sont une douzaine. Trois générations. « Il y a ma femme Suzanne, mes frères et soeurs accompagnés de leurs conjoints, les enfants et petits enfants. » Pourquoi Cannes ?
« Monsieur Guez recrée pour nous une ambiance ashkenaze. Pas de faux pas, on n'est jamais déçus ».
Si Bernard Kanter est traditionaliste, il dit apprécier se retremper dans une ambiance judaïque.
« Cela nous permet de ne pas tomber dans l'assimilation ».
G.A. - Nice-matin - 11 avril 2009