Un vent de panique a soufflé à nouveau mercredi sur les Bourses mondiales qui ont poursuivi leur plongeon entamé lundi, malgré la baisse surprise des taux directeurs des grandes banques centrales et un plan de choc qui revient à une nationalisation partielle des banques britanniques.
La dégringolade a été accentuée par les sombres perspectives du Fonds monétaire international (FMI) pour l'économie mondiale, annonçant un coup d'arrêt brutal à la croissance, qui n'atteindrait que 0,1% aux Etats-Unis et 0,2% dans la zone euro l'an prochain.
"Reprenez vos esprits", a lancé le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, en direction des marchés financiers. "Le pessimisme excessif est très mauvais conseiller".
Dans un geste sans précédent depuis les attentats du 11 septembre 2001, six banques centrales -- la BCE, la Réserve fédérale américaine (Fed) et leurs homologues suédoise, britannique, canadienne et suisse -- ont annoncé une baisse d'un demi-point de leurs taux directeurs. Au même moment la Chine a elle aussi annoncé une baisse du loyer de l'argent.
Autre mesure phare, annoncée par le gouvernement britannique: un plan de sauvetage des banques qui pourra passer par leur nationalisation partielle à hauteur de 50 milliards de livres (65 milliards d'euros).
Mais rien ne semblait pouvoir rassurer les investisseurs, affolés par la poursuite de la crise et ses répercussions sur l'économie, en dépit des initiatives des gouvernements, qui se sont multipliées depuis l'adoption vendredi aux Etats-Unis du Plan Paulson, doté de 700 milliards de dollars.
Wall Street a perdu 2% au terme d'une séance en montagnes russes, tandis que la Bourse de Sao Paulo, première place d'Amérique latine, a accusé une chute de 3,82%.
Auparavant, les Bourses européennes avaient clôturé en forte baisse: Londres a plongé de 5,18%, Francfort de 5,88% et Paris de 6,39%. En Asie, Tokyo a dévissé de 9,38%, une baisse historique, la plus forte depuis plus de 20 ans.
La thérapie de choc des banques centrales a été saluée par la France et l'Allemagne et, aux Etats-Unis, elle a fait l'unanimité, une fois n'est pas coutume, auprès des deux rivaux dans la course à la Maison Blanche, le républicain John McCain et le démocrate Barack Obama.
Toutefois, la baisse de taux décidée par la Réserve fédérale est insuffisante pour sortir les Etats-Unis de la crise, jugeaient mercredi les analystes.
Les mesures adoptées par le Congrès américain pour faire face à la crise financière commenceront à porter leurs fruits dans deux semaines et demie, a déclaré par téléphone le président américain George W. Bush à son homologue brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, selon des propos rapportés par un porte-parole de la présidence du Brésil.
Le secrétaire au Trésor américain Henry Paulson a déclaré que d'autres faillites d'institutions financières étaient à prévoir aux Etats-Unis malgré le plan de sauvetage des banques.
"Même avec les nouveaux outils du Trésor, certaines institutions financières vont faire faillite", a reconnu M. Paulson, qui a souligné que la patience était nécessaire face à des turbulences sur les marchés "qui ne vont pas se terminer rapidement".
Comme pour lui donner raison, la Fed a annoncé qu'elle allait fournir à l'assureur AIG, qui avait été nationalisé à la mi-septembre, 37,8 milliards de dollars de liquidités supplémentaires, après que ce dernier eût consommé une grande partie du prêt de 85 milliards fourni par la Fed.
L'euro a été dopé par la baisse des taux, valant 1,3660 dollar vers 20H40 GMT, contre 1,3599 dollar mardi soir. Les prix du pétrole ont reculé à 88,95 dollars, en baisse de 1,11 dollar par rapport à la clôture de mardi.
Les gouvernements restaient mobilisés sur tous les fronts pour renforcer le système bancaire et éviter un assèchement complet du crédit.
Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a annoncé que le Trésor entrerait dans le capital des banques en cas de besoin, mais avec des actions sans droits de vote, excluant ainsi une nationalisation.
La France mettra en place une structure juridique permettant à l'Etat d'intervenir financièrement en faveur des banques françaises.
Le Premier ministre britannique Gordon Brown a invité les autres pays de l'UE à adopter un "plan européen de financement" du système bancaire, un projet déjà évoqué par l'Italie et les Pays-Bas, mais rejeté par l'Allemagne.
Une réforme de la régulation du système financier, proposée par Londres, devrait figurer au menu de la réunion vendredi à Washington des ministres des Finances et banquiers centraux des pays du G7 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni).
Une réunion du Groupe des 20 (G20), rassemblant les ministres et banquiers centraux des principaux pays riches et émergents, aura lieu samedi à Washington en marge des réunions d'automne du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale.
La chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy "sont convenus que les actions de l'Allemagne et de la France relatives à la crise financière seront totalement coordonnées", a annoncé l'Elysée.
Le grand chambardement du paysage bancaire s'est poursuivi: la Caisse d'Epargne a approuvé son projet de fusion avec la Banque Populaire, un mariage qui permettrait de créer la deuxième banque de dépôts française.
En Islande, l'Etat a pris officiellement le contrôle de la banque Glitnir, au bord de la faillite. Fait inédit, un millier d'Islandais se sont rassemblés à Reykjavik pour exprimer leur inquiétude face à la crise financière qui menace de mettre à genoux leur pays.
AFP. 09.10.08