Alors que l'OMS juge "possible" que le virus mutant de la grippe porcine devienne "beaucoup plus dangereux", les mesures de vigilance et de précaution se multiplient dans le monde pour contrer la menace d'une épidémie.
Pour l'instant, seule la Russie a décidé d'interdire "à partir du 26 avril les importations de viande venant du Mexique et du Texas, de Californie et du Kansas". Les importations de porc et de produits préparés à partir du porc sans avoir subi de traitement thermique venant du Guatemala, du Honduras, de Colombie, du Costa-Rica, de Cuba, du Nicaragua, du Panama, du Salvador, ainsi que de plusieurs Etats américains sont également interdites. Une mesure pourtant inutile, a priori, le virus se transmettant d'homme à homme.
Les Etats-Unis pour leur part, le deuxième pays le plus touché après le Mexique, avec des cas recensés dans plusieurs Etats et jusqu'à New York, ont déclaré l'état d'urgence sanitaire. Selon le conseiller à la Sécurité intérieure de Barack Obama, le président américain a ordonné une "réponse efficace, énergique, coordonnée". Et des dépistages vont être effectués sur les personnes qui se présenteraient aux frontières en provenance de pays touchés par le virus - ce qui n'est pas actuellement le cas.
Des mesures de précaution
Tous les autres pays ont pris uniquement des mesures de précaution et d'information à destination des voyageurs revenant des pays où l'épidémie existe. Dès vendredi, les pays voisins d'Amérique Latine ont annoncé des mesures de précaution. Le Pérou, le Chili, l'Equateur et le Costa Rica ont activé des plans de vigilance sanitaire comprenant une intensification de la surveillance des voyageurs en provenance du Mexique (où le nombre de morts pourrait dépasser 80) et des Etats-Unis. En Colombie également, où cinq voyageurs en provenance du Mexique ont été placés sous surveillance, les autorités sanitaires ont été convoquées samedi pour mettre en place un plan de prévention.
A Bruxelles, la Commission européenne a indiqué suivre "de très près" la situation en précisant que "jusqu'à présent, aucun cas n'a été signalé dans l'Union européenne". En Espagne, où trois personnes ont été placées "en observation" par mesure "de précaution", les autorités recommandent la prudence avant de se rendre au Mexique. En France, où des centres de crise ont été mis en place, un cas suspect est en cours d'investigation. Le gouvernement belge ne déconseille pas pour l'instant les voyages au Mexique, à condition que les touristes respectent certaines règles d'hygiène de base. Les mêmes recommandations s'appliquent aux voyages aux Etats-Unis.
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Ce week-end, l'Organisation mondiale de la santé n'a pas hésité à déclarer que le virus mutant de la grippe porcine, qui a déjà fait 20 morts au Mexique sur un total de 81 "probables", a "clairement un potentiel pandémique". Convoqué samedi soir par l'OMS, le comité d'urgence a même conclu que l'apparition d'un virus de la grippe porcine transmissible d'homme à homme représentait une "urgence en terme de santé publique et une préoccupation internationale". Dimanche, Keiji Fukuda, vice-directeur général de l'OMS par intérim, chargé des questions de sécurité sanitaire et environnementale, est allé plus loin encore en envisageant de nouvelles mutations. "Il est fort possible que le virus évolue. Quand les virus évoluent, il est clair qu'ils peuvent devenir beaucoup plus dangereux pour la population", a-t-il estimé.
Pour autant, il juge le monde mieux préparé que jamais à un risque de pandémie grippale. Et ce, paradoxalement, grâce au précédent de la grippe aviaire. Selon ce haut responsable de l'OMS, la communauté mondiale se préparait en effet depuis cinq ans à faire face à une éventuelle pandémie de grippe aviaire. Et l'Organisation et ses partenaires ont déjà entamé des travaux préliminaires pour préparer si nécessaire un vaccin contre la grippe porcine.
La situation est "sérieuse" et "imprévisible"
D'après les analyses, le virus ressemble beaucoup au virus du porc, mais sous une forme jamais vue mêlant de l'ADN typique des virus porcin, aviaire et humain. Le fait que la plupart des victimes mexicaines soient âgées de 25 à 45 ans constitue également un facteur d'inquiétude : les épidémies saisonnières de grippe peuvent être plus meurtrières parmi les très jeunes enfants et les vieillards, mais une des caractéristiques des pandémies est qu'elles affectent les jeunes adultes en bonne santé. Selon l'OMS, le virus semble sensible au Tamiflu de Roche AG, connu aussi sous le nom d'oseltamivir, mais pas aux médicaments plus anciens contre la grippe tels que l'amantadine.
Les groupes pharmaceutiques se disent d'ores et déjà prêts à fournir des millions de doses de médicaments et à travailler à un vaccin. Le laboratoire Roche dit tenir à la disposition de l'Organisation mondiale de la santé trois millions de colis de Tamiflu, la moitié aux Etats-Unis, et l'autre moitié en Suisse. "Pour l'instant, l'OMS ne nous a pas demandé de mobiliser ces stocks. Bien sûr, dès qu'elle le demandera, nous le ferons", a souligné une porte-parole de Roche. Quant aux laboratoires spécialisés dans les vaccins, ils se sont dits prêts à entamer dès que possible le processus de développement d'un vaccin. Les leaders en la matière sont Sanofi Pasteur, la division vaccins de Sanofi-Aventis, Glaxo, Novartis et Baxter International.
En attendant, la prévention est primordiale pour éviter une propagation du virus. La directrice générale de l'OMS, Margaret Chan, a recommandé à tous les pays d'intensifier "leur surveillance de tous les cas inhabituels de maladie ressemblant à une grippe ou à une grave pneumonie". La situation est "sérieuse", "imprévisible" et "évolue vite", a averti la directrice générale de l'OMS depuis le siège de l'organisation à Genève.
LCI.fr - 26/04/09