Le chef de l'Etat est venu faire la promotion du « traité simplifié » sur l'Europe, hier soir, devant le bureau politique de l'UMP. Une rupture avec la tradition qui voulait que le président ne se rende pas au siège de son ancien parti.
Depuis qu'il est à l'Elysée, Nicolas Sarkozy n'avait pas remis les pieds au siège parisien de l'UMP. C'est chose faite depuis hier soir. Bousculant une fois de plus l'équilibre institutionnel censé placer le président de la République au-dessus des partis, il est arrivé vers 18 h 15, rue La Boétie à Paris, avec à ses côtés Jean-Pierre Jouyet, son secrétaire d'Etat aux Affaires européennes.
Motif officiel de son impérieuse visite : expliquer aux 80 membres du bureau politique de l'UMP, rameutés en urgence, l'importance de l'accord sur le « mini-traité » européen obtenu vendredi à Lisbonne, un accord que Sarkozy ne se prive pas de considérer comme un grand succès personnel.
Pour l'occasion, l'Elysée avait fait convoquer, samedi soir, dare-dare, un bureau politique extraordinaire à coups de SMS - le député Hervé Mariton a reçu le sien dans les tribunes du Stade de France vers 21 h 30 - quitte à faire grogner quelques-uns de ses membres pas tous ravis de devoir regagner Paris à la hâte.
Ni François Mitterrand ni Jacques Chirac ne s'étaient rendus jusqu'au siège de leur ancien parti durant leur mandat. Ils se contentaient d'en recevoir les principaux dirigeants à l'Elysée. Dans le huis clos du bureau politique, Sarkozy a pris plaisir à dénoncer cette « hypocrisie anormale ». « C'est une modernisation des relations entre le président et sa famille politique et il la mène dans la transparence », s'est enthousiasmée la députée lèche-bottes Nadine Morano.
L'opposition ne manquera pas, elle, de critiquer une sorte de coup de force, comme un préalable à la future intervention du président au Parlement une fois que les réformes concoctées au sein de la commission Balladur auront été menées à bien.
Invité du « Grand Rendez-vous » Europe 1-TV5-« le Parisien »-« Aujourd'hui en France », François Bayrou a ainsi dénoncé « une faute contre la fonction : le chef de l'Etat doit être au-dessus des partis et n'a pas à avoir de dialogue direct avec eux, fût-ce le sien ! »
Reste que les dirigeants de l'UMP ont répondu sans coup férir à la convocation. Seul Jean-Claude Gaudin, retenu à Marseille, Rama Yade en route pour le Darfour, Christian Estrosi et Christine Lagarde, eux aussi excusés, n'ont pas assisté à ce bureau politique. Une grand-messe qui sonnait aussi comme un rappel à l'ordre de l'UMP. Conscient du changement de contexte en cette rentrée, et mécontent de la cacophonie qui a parfois sévi au sein de son parti sur l'« ouverture » ou les tests ADN, Sarkozy juge, comme souvent, qu'il doit tout faire lui-même.
« Nicolas trouve que la presse n'a pas assez salué le succès de sa négociation sur ce traité simplifié et que l'UMP n'a pas été assez en soutien, confiait un membre du bureau politique à la sortie. Il voulait montrer qu'il reprend les choses en main et en direct ! » Aussitôt le président reparti, sans faire de déclaration, le secrétaire général délégué de l'UMP, Patrick Devedjian, a annoncé le lancement d'une campagne, « 48 heures pour l'Europe avec l'UMP ». Et François Fillon a insisté sur la « grande victoire européenne pour le président qui a gagné la partie ».