Après un dîner mardi soir dans une résidence de la banlieue moscovite, les deux chefs d'Etat se sont retrouvés mercredi au Kremlin pour un nouvel entretien ponctué d'une conférence de presse qui a laissé paraître au grand jour leurs différences, notamment sur le nucléaire iranien.
Comme il l'avait fait la veille devant la presse française, Nicolas Sarkozy a confié mercredi avoir noté "une certaine convergence" sur ce dossier, où la Russie s'oppose, contrairement à la France, à l'adoption de nouvelles sanctions onusiennes pour empêcher Téhéran de se doter de l'arme atomique.
Loin de toute convergence, Vladimir Poutine a lui redit, devant son homologue, la position ferme de son pays, assurant ne pas avoir "d'informations selon lesquelles l'Iran aspire à produire des armes nucléaires".
"Nous n'avons pas de telles données objectives, c'est pourquoi nous partons du principe que l'Iran n'a pas de tels plans", a poursuivi le président russe, assurant toutefois partager les "préoccupations" de ses partenaires.
"Il peut y avoir des divergences d'analyse. Sur "ils la font", je crois que tout le monde est d'accord. Est-ce qu'ils vont l'utiliser, c'est une question d'analyse", a répondu le président français à propos de la bombe iranienne. "Ce qui est important, c'est la volonté de coopérer", a-t-il insisté.
Sur le Kosovo, autre pomme de discorde, M. Sarkozy a jugé "très important que l'Europe reste unie et que la discussion reste ouverte avec nos amis russes sur cette question" afin de trouver une "solution qui n'humilie personne".
Allié traditionnel de la Serbie, Moscou refuse l'indépendance du Kosovo que soutient la France. La "piste" dont a fait état mardi soir Nicolas Sarkozy pour "rapprocher les points de vue" n'a pas été évoquée publiquement mercredi.
Si elles sont restées éloignées sur ces dossiers, la France et la Russie ont à l'inverse loué leur partenariat sur le plan économique, notamment en matière d'espace, d'aéronautique et d'énergie.
Assurant qu'il n'y aurait "pas de protectionnisme côté français", le président Sarkozy a ajouté que des investisseurs français étaient disponibles pour "entrer dans le capital" du géant gazier russe Gazprom. "Pas de tabou, pas de limite" en la matière, a-t-il insisté, juste "transparence et réciprocité".
Pour sa part, Vladimir Poutine a assuré que les entreprises françaises avaient "la possibilité" de travailler en Russie.
Sur la question délicate des droits de l'Homme, thème de la plupart des critiques qu'il a adressées ces derniers mois à la Russie, M. Sarkozy a indiqué avoir fait valoir à M. Poutine ses convictions "avec franchise".
Il "m'a répondu avec la même franchise parce que nous considérons que l'amitié consiste à se dire les choses", a ajouté M. Sarkozy.
Le président français a ensuite rencontré des représentants d'ONG russes, dont Memorial, qui dénonce les violations des droits de l'Homme en Tchétchénie. Interrogé lors de la conférence de presse sur cette initiative, le président russe a estimé qu'il n'y voyait "rien de condamnable".
S'il a répété que "la France ne souhaite donner de leçon à personne", le président français a, avant de rejoindre le Kremlin, vanté les mérites de la démocratie devant des étudiants de l'université Bauman à Moscou.
"C'est tellement mieux de vivre dans une démocratie", s'est-il exclamé en réponse à une question sur l'arrestation en France en janvier du milliardaire russe Mikhaïl Prokhorov dans le cadre d'une affaire de prostitution.
"Un pays où la justice n'est pas indépendante, ce n'est pas un pays libre", a noté le président français. "Vous connaîtrez cela un jour, c'est ce que je vous souhaite", a-t-il lancé aux jeunes Russes.